Attal néodreyfusard : n’est pas Zola qui veut04/06/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/06/une_2966-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Attal néodreyfusard : n’est pas Zola qui veut

Gabriel Attal, ex-Premier ministre de Macron et aujourd’hui chef des députés du parti présidentiel, a déposé un projet de loi pour élever feu Alfred Dreyfus au rang de général de brigade.

Dreyfus était capitaine lorsqu’il fut accusé d’espionnage au profit de l’Allemagne, en 1894. Condamné en 1895, dégradé, il fut envoyé au bagne de l’île du Diable, en Guyane. Il apparut alors que Dreyfus était victime d’un complot que la hiérarchie militaire refusait absolument de reconnaître. Bien au contraire, l’état-major et tous les milieux réactionnaires, l’Église, les cléricaux, les partis de droite, les royalistes, etc., menaient campagne sur le thème « Dreyfus est coupable parce que juif ». Le journal La Croix se targuait alors d’être le premier journal antisémite de France et des politiciens se faisaient élire sur un programme « antijuif ».

Grâce à la campagne des « dreyfusards », dont le plus connu fut Émile Zola, appuyés par les partis et militants ouvriers, Jaurès en tête, Dreyfus fut sorti du bagne au bout de quatre ans, rejugé, recondamné puis gracié par le président de la République. Enfin, en 1906, il fut innocenté, réhabilité, réintégré dans l’armée et décoré de la légion d’honneur pour solde de tout compte.

Dans la légende républicaine telle qu’on l’enseigne aux enfants des écoles et aux députés conformistes, l’affaire Dreyfus est devenue le symbole du sursaut républicain et de la victoire contre l’antisémitisme. Certes, le pouvoir politique civil a contraint l’état-major à réintégrer Dreyfus, mais la hiérarchie militaire n’a, en fait, jamais admis son crime et a refusé systématiquement toute forme de réparation. Aujourd’hui encore, c’est le pouvoir politique, pour ses raisons propres, qui doit passer par une loi pour obliger l’armée à donner à Dreyfus le grade qu’il aurait atteint s’il n’était pas passé par le bagne. Le sursaut républicain n’a jamais effleuré l’état-major ni en 1906 ni depuis.

L’antisémitisme n’a évidemment pas disparu avec la réhabilitation de Dreyfus, il est même arrivé au pouvoir en 1940, sans beaucoup de protestations de l’État, des classes possédantes ou de leurs représentants. Il reste prêt à resurgir aujourd’hui comme hier.

Pour bien des responsables politiques, la lutte contre l’antisémitisme, dont la promotion posthume de Dreyfus fait partie, est aujourd’hui le masque poli du soutien sans faille à Israël, c’est-à-dire à la stabilité de l’ordre impérialiste au Moyen Orient. Mais les alliances peuvent changer, pourvu que l’ordre reste. Dans ce cas, nombre de prétentions dreyfusardes d’aujourd’hui s’évaporeraient, et pas seulement dans les rangs du RN, cet héritier en ligne directe de l’antisémitisme politique français.

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