Déserts médicaux : vrai problème, faux débat06/05/20252025Journal/medias/journalarticle/images/2025/05/P5-1_d%C3%A9sert_m%C3%A9dical_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C75%2C800%2C525_crop_detail.jpg

Leur société

Déserts médicaux : vrai problème, faux débat

Réalisé à l’occasion du projet de loi censé favoriser l’installation de médecins en milieu rural, un sondage donne l’absence d’investissement de l’État comme première cause des problèmes rencontrés par le système de santé. Or, cette question essentielle est en grande partie mise de côté dans le débat actuel.

Illustration - vrai problème, faux débat

De fait, l’État n’intervient qu’à la marge, pour la recherche médicale, pour la complémentaire santé solidaire et l’aide médicale d’État, et enfin pour la prévention, bien mal en point. Sur 3 659 euros de dépenses de santé par habitant en 2023, l’État n’en a payé que 23. La plus grosse part provient des prélèvements sur les salaires, 2 910 euros par les cotisations de Sécurité sociale et 454 euros par les organismes complémentaires. Et il est resté sur l’année 274 euros à la charge de chaque habitant ayant les ressources suffisantes et n’étant pas dans l’obligation de renoncer aux soins.

L’État intervient non pour apporter des ressources, mais pour comprimer les dépenses de santé. Une limitation du nombre des soignants est intervenue non seulement pour les médecins, mais aussi pour les élèves infirmières entre 1983 et 2000. Le financement des hôpitaux dépend d’un budget annuel fixé à l’avance, à ne pas dépasser. Les objectifs de productivité ont été renforcés à l’occasion des lois sur les 35 heures, appliquées à partir de 1997 dans les hôpitaux sans embauche correspondante. Dans les villes moyennes ou petites, au lieu de tirer vers le haut la qualité des services et des maternités locales, on a connu une longue série de fermetures malgré l’opposition de la population. Ces mesures prises quand la gauche était au gouvernement ont naturellement été amplifiées par la suite.

Quant aux cotisations sociales, elles sont chahutées par la baisse de la masse des salaires, aggravée par chaque vague de licenciements et la volonté patronale de se soustraire à ses responsabilités. Ainsi a été inventé le « trou de la Sécu » qui, comme l’ensemble de la dette publique, constitue une excellente affaire pour le monde de la finance. Alors qu’une partie croissante de la population éprouve des difficultés à se soigner, discriminée par la géographie ou par sa place dans la société, le système de santé fonctionne au mieux pour ses créanciers.

Le débat actuel sur l’installation des médecins libéraux part d’un problème bien réel, mais il amplifie l’écran de fumée autour de la financiarisation du système de santé. S’il existait un service public de santé avec des centres de soins bien répartis sur le territoire et des soignants formés en nombre suffisant, la médecine libérale n’aurait que la place qu’elle mérite.

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