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Hongrie : contre Orban, quelle opposition ?
Le 28 juin, avec près de 200 000 participants selon la presse, la « Marche des fiertés » de Budapest a connu un succès notable. Non seulement les défenseurs habituels des droits LGBT ont défilé, mais visiblement nombre de participants ont saisi l’occasion de défier le gouvernement de Victor Orban.

Si Orban avait interdit la manifestation, le maire écologiste de Budapest lui a répondu en l’autorisant. Le rassemblement a eu ainsi le caractère d’une protestation contre l’autoritarisme gouvernemental, que tous les opposants à Orban ont salué. Mais si la population et les travailleurs hongrois ont en effet bien des raisons de se dresser contre ce gouvernement, ils en ont aussi bien d’autres de se méfier de ses différents opposants politiques.
On a vu notamment les principaux dirigeants européens s’affirmer, avec la présidente de la Commission européenne, Ursula Van der Leyen, solidaires de ce mouvement anti-Orban. Orban est bien sûr un réactionnaire affirmé, qui surfe sur le nationalisme et les idées les plus rétrogrades, à l’égal de bien d’autres en Europe. Mais là, le « drapeau des libertés » brandi par les dirigeants européens a de quoi laisser sceptique.
Ce que dit Victor Orban sur l’immigration ou sur les autres sujets sociétaux, les dirigeants européens s’en moquent. Allemands, italiens ou français, ils mènent la même politique qui se sert des immigrés comme boucs émissaires de leur politique anti-ouvrière et guerrière.
En fait, ils reprochent à Orban de dénoncer, au nom des intérêts de ses propres capitalistes, la dictature économique que les grands impérialismes européens imposent aux autres pays de l’Union, qu’ils considèrent comme leur zone d’exploitation protégée. Et ils reprochent aussi à Orban la distance qu’il prend avec la politique qu’ils mènent en Ukraine.
La Hongrie, pays de neuf millions d’habitants, est gouvernée par Orban et son parti le Fidesz depuis 2010. Après un premier passage au pouvoir de 1998 à 2002, c’est le rejet absolu de la politique anti-ouvrière agressive de la pseudo- gauche qui l’a ramené au pouvoir et l’y a maintenu jusqu’à maintenant. Le pays est dominé économiquement par l’impérialisme allemand et américain. Le spéculateur international Georges Soros a subventionné ouvertement tous les partis d’opposition. Jusqu’à l’arrivée de Trump au pouvoir qui a, au moins temporairement, fermé le robinet, l’ambassade des États-Unis a d’ailleurs fait de même.
Les prix flambent, l’incertitude sur l’avenir gagne la classe ouvrière, mais dans les grèves qui ont touché certains secteurs de l’industrie et des transports publics, les travailleurs se sont retrouvés seuls. L’opposition, qu’il est difficile de classer à gauche, puisqu’elle a intégré le parti d’extrême droite Jobik, a brillé par son absence et souvent par son opposition aux grévistes.
Il faut noter qu’Orban a su se montrer l’homme des capitalistes, y compris en modifiant, quand il le fallait, sa politique anti-immigrés. Répondant aux demandes de la grande industrie, en même temps qu’il faisait fermer de façon démonstrative les frontières aux migrants venus de l’Est, il autorisait la venue, en avion, de milliers de travailleurs d’Indonésie et d’autres pays d’Extrême-Orient.
Enfin, en plus de renforcer son pouvoir personnel, Orban n’oublie pas d’accaparer une partie des richesses du pays au profit de sa propre famille. C’est ce népotisme qui a commencé à fracturer son propre parti d’où ont émergé des oppositions de plus en plus affirmées. Aujourd’hui, c’est derrière Peter Magyar, chef du parti Tisza et ancien cacique de Fidesz, que toute l’opposition tend à se regrouper. C’est dire que cette opposition n’annonce aucun véritable changement pour les travailleurs, si ce n’est un ralliement ouvert aux impérialistes européens et américains. Le prolétariat hongrois, qui a su mener deux révolutions au 20e siècle, a derrière lui une solide tradition de lutte. C’est la seule qui peut lui donner une perspective d’avenir.