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Israël : la contestation dans l’armée s’étend
L’armée israélienne est confrontée à un nombre de plus en plus important de refus des réservistes de rejoindre leur corps d’armée ainsi qu’à une série de protestations collectives de militaires.
Après avoir fait leur service militaire, les Israéliens restent réservistes jusqu’à leurs 40 ans et peuvent être convoqués à tout moment. Après le 7 octobre, des réservistes qui n’étaient pas appelés se présentaient volontairement ; 300 000 hommes et femmes avaient alors rejoint leur unité. Depuis, le taux de réservistes convoqués rejoignant leur unité n’a cessé de baisser. Il oscillerait entre 75 % et 85 % selon l’armée, mais seulement 60 à 70 % selon des journalistes israéliens. Des campagnes de recrutement ont lieu par des groupes WhatsApp et les ministres des Finances et de la Défense ont annoncé un budget de 3 milliards de shekels (720 millions d’euros) pour offrir des « avantages » aux réservistes, par exemple une réduction fiscale supplémentaire ou encore un porte-monnaie numérique crédité en fonction des jours de service effectués.
Cela ne suffit pas à convaincre tous les réservistes d’abandonner leur famille et leur travail pour aller faire la guerre. La majorité de ceux qui ne répondent pas à l’appel le font discrètement, mais un mouvement collectif s’est développé récemment. Ainsi, un millier de pilotes et aviateurs, pour la plupart de réserve mais aussi d’active, ont signé une lettre accusant Netanyahou de mettre en péril la vie des derniers otages détenus par le Hamas. Sans se prononcer contre la guerre, et encore moins contre l’armée israélienne, ils ont dénoncé l’acharnement de Netanyahou en l’attribuant à des « intérêts politiques et personnels », car la situation lui permet de prolonger sa présence à la tête de l’État alors qu’il est mis en cause dans plusieurs affaires de corruption. Tous les signataires de la lettre ont été renvoyés de l’armée, mais un groupe de 150 anciens officiers de la marine ont à leur tour apposé leur signature suivis, lundi 14 avril, par plus de 1 500 réservistes et vétérans du corps des blindés de l’armée israélienne qui réclament à l’État un cessez-le-feu et le retour des otages par la voie diplomatique.
Ces protestataires ne se placent pas sur le même terrain que les militants qui refusent de servir en dénonçant l’oppression des Palestiniens, les refuzniks, et qui sont passibles de condamnations. Ainsi, en mars, une militante des Jeunesses communistes de Tel Aviv âgée de 18 ans a été condamnée à trente jours de prison pour avoir refusé de faire son service : « Nous ne participerons pas au génocide à Gaza ni à l’oppression du peuple palestinien », a-t-elle déclaré lors d’un rassemblement organisé pour la soutenir. Itamar Greenberg, un autre jeune objecteur de conscience de 18 ans qui dénonçait « un système de violence, de domination et d’oppression », a passé 197 jours en détention.
Mais d’après Yesh Gvul, l’un des groupes qui soutient les refuzniks, le mouvement de refus actuel serait le plus important depuis la guerre du Liban en 1982. Même si ceux qui dénoncent la politique coloniale que mène Israël contre les Palestiniens y sont très minoritaires, il montre que la lassitude de la guerre touche des milieux de plus en plus larges, qui ressentent l’impasse que constitue cette guerre sans fin non seulement pour les Palestiniens victimes des bombardements, mais aussi pour la population israélienne.