Iveco Bus – Annonay : le patron organise le chaos06/05/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/05/une_2962-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Iveco Bus – Annonay : le patron organise le chaos

Le marché du bus électrique se porte bien, car au nom de la transition écologique, les collectivités locales passent des commandes par milliers et payent rubis sur l’ongle. Les commandes affluent, les bénéfices explosent, mais cela se traduit par une dégradation des conditions de vie et de travail des salariés.

L’usine Iveco Bus d’Annonay, en Ardèche, a été récemment réorganisée, provoquant un chaos. La majorité des bus sortent des lignes incomplets. Quelques mois après avoir lancé la deuxième ligne de production consacrée à l’électrique, la direction a dû ouvrir trois nouveaux ateliers de rattrapage. Fin avril, la dernière tentative de montée en cadence a encore échoué, un seul véhicule sortant des lignes dans chaque équipe, contre deux avant la réorganisation, alors que la direction voudrait arriver à huit.

Certains travailleurs se demandent comment Iveco a pu provoquer une telle désorganisation. La raison est que le patron veut réaliser sa « transition » à moindre frais, en la faisant payer aux salariés. Pour avoir des travailleurs qualifiés en les payant le moins possible, Iveco les fait venir d’Italie, d’Espagne et des Philippines. Certaines semaines, la hiérarchie a fait travailler les ouvriers italiens de 5 heures à 23 heures, à l’écart des autres ouvriers, avec deux « singes hurleurs », des directeurs affectés spécialement à leur hurler dessus en italien. Pour mieux diviser, la direction s’est vantée d’avoir déboursé 100 000 euros pour faire venir soixante-dix soudeurs des Philippines, ou encore de verser des primes de déplacement de 1 000 euros à des ouvriers venus du Nord de la France, tout en se plaignant qu’elle n’arrive pas à recruter localement.

Près de mille nouveaux travailleurs, intérimaires pour l’immense majorité, sont arrivés sans rien de prévu pour les accueillir. Faute de parking, ils se garent où ils peuvent, dans les cités alentour ou sur les trottoirs envahis de voitures. Pour éviter les tensions avec le voisinage, la direction a demandé à la préfecture de verbaliser. Plusieurs ouvriers ont eu des amendes de 135 euros, parfois deux jours de suite, quand leur salaire journalier n’est que de 80 euros ! L’affaire a choqué largement. Certains nouveaux arrivants dorment à l’hôtel en payant 50 euros par nuit. D’autres partagent des appartements dont les propriétaires ont opportunément augmenté les loyers.

Cette désorganisation et la généralisation des horaires en 2x8 ont beaucoup dégradé les conditions de travail et créé des tensions. La direction y répond en cherchant à diviser. Elle mène une campagne contre l’« absentéisme » et sur la qualité, en pointant du doigt les jeunes intérimaires, prétendument moins sérieux, et en les opposant aux embauchés plus anciens, effarés par le chaos qui règne à l’usine. Mais ces manœuvres sont loin d’empêcher la révolte face à toutes les mesquineries du patron. Deux rassemblements, appelés par la CGT la semaine du 1er mai, ont rassemblé des travailleurs embauchés, intérimaires et sous-traitants, ce qui a été remarqué et apprécié. Tous ont pu s’y retrouver pour échanger et exprimer leur opposition à la politique du patron.

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