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Jean-Pierre Mercier : “renouer avec les luttes et avec la conscience révolutionnaire”

Le Medef, à court terme, cherche des moyens de maximiser encore ses profits mais surtout, à long terme, il prépare l’économie de guerre, et pour cela, il déclare déjà la guerre au monde du travail ! (…) Alors oui, nous n’aurons pas d’autres solutions que de nous battre, que de mener une contre-offensive de grande ampleur contre ces projets mortifères. Cette contre-offensive, on ne peut pas l’attendre des directions des confédérations syndicales. (…)
Les dirigeants des confédérations syndicales sont passés, depuis bien des décennies, avec armes et bagages dans le camp du patronat, sont devenus, comme disait déjà Trotsky en son temps, les agents de la bourgeoisie au sein du mouvement ouvrier. Ils se sentent parfaitement à l’aise dans le rôle de « partenaires sociaux » que la bourgeoisie leur assigne – « partenaires », et non ennemis de classe –, ils ne cherchent pas et ne chercheront jamais à aller plus loin.
L’intégration des syndicats
Et lorsque demain, la colère des travailleurs éclatera et les dépassera, ils commenceront par courir derrière le mouvement pour tenter d’en prendre la tête pour mieux le trahir et, comme l’ont fait leurs ancêtres de 1936 et de 1968, ils seront à la manœuvre pour faire arrêter les grèves et tenter d’éteindre l’incendie social.
L’intégration profonde des syndicats à la société capitaliste ne concerne pas que les dirigeants confédéraux.
Elle touche aussi bien des militants syndicaux sur le terrain, dans les entreprises, que le patronat a peu à peu réussi à apprivoiser, à amadouer, à acheter, en leur donnant l’impression d’avoir un rôle à jouer, en les invitant à bavarder autour des tables de pseudo- négociations, en leur confiant des responsabilités pour gérer les CSE, à les transformer en organisateurs de colonies de vacances ou en gestionnaires de cantines, bien plus qu’en organisateurs de la lutte de classe. (…) Et comment pourrait-il en être autrement aujourd’hui ?
Depuis des décennies, non seulement la combativité ouvrière est au plus bas, mais en plus, il n’y a pas de parti politique ouvrier, communiste et révolutionnaire, pour influencer les militants syndicaux et les empêcher de se faire aspirer dans les sables mouvants de la collaboration avec la bourgeoisie.
C’est même l’inverse. Ces militants sont souvent influencés par le PS, le PCF ou LFI, quand ce n’est pas le RN. Et ces partis rabâchent tous que la seule voie pour changer notre sort, c’est de bien voter, pour les porter au pouvoir. Ils répètent tous qu’il faut aider les entreprises, c’est-à-dire les patrons, surtout s’ils sont français. (…)
Aucun mouvement de contestation ne pourra l’emporter contre la bourgeoisie sans idées politiques et sans organisation – mais des idées politiques communistes et une organisation qui vient d’en bas, une organisation discutée et décidée à la base, imposée par la base !
Oui, il faut que les travailleurs se méfient comme de la peste des politiciens professionnels qui viendront leur déclarer leur amour, « ces bourgeois déguisés en tribuns » avec « leurs phrases sonores d’avocat », comme disait le révolutionnaire Auguste Blanqui.
Leurs dirigeants, les travailleurs devront les trouver parmi eux. Leur stratégie, leurs modes d’actions, leur programme, leurs revendications, ils devront les définir eux-mêmes, démocratiquement, à la base, en reprenant l’habitude de se réunir, de discuter, de voter et d’élire leurs propres représentants en créant leurs propres organes de direction – comités de lutte, comités de grève !
Diriger nos luttes
Car les luttes de demain ne pourront échapper à l’influence délétère des confédérations syndicales et des partis politiques bourgeois qu’à condition de voir naître en leur sein de tels comités, organes de démocratie ouvrière directe, qui éliront leurs propres représentants et les révoqueront s’ils trahissent, qui définiront eux- mêmes, démocratiquement, librement, leurs méthodes de lutte et leurs objectifs. Des comités qui refuseront d’être automatiquement placés sous l’influence d’un chef syndical autoproclamé – parce qu’on est déjà dirigés par des chefs dans les entreprises, par des flics en dehors des entreprises, alors dans nos luttes, c’est nous-mêmes qui devons être nos propres chefs ! (…) Pour les communistes révolutionnaires, les travailleurs ne sont pas une masse de manœuvre mais la classe sociale qui changera le monde et dirigera la société de demain !
Et c’est dans les grèves, dans le combat, que cet apprentissage se fait, lorsque les travailleurs découvrent qu’ils ont l’intelligence et la force collective de diriger eux-mêmes au lieu d’être dirigés, lorsqu’ils font l’expérience de cette force et en mesurent les effets, lorsqu’ils prennent conscience, en étant les acteurs et les dirigeants de leurs propres luttes, de leur unité, en jetant d’un coup à la poubelle toutes les divisions mortelles que la bourgeoisie leur met dans le crâne – français contre immigrés, jeunes contre vieux, public contre privé, hommes contre femmes ! Dans les comités de lutte, dans des comités de grève, tous les combattants sont sur un pied d’égalité, et c’est ce qui en fait un extraordinaire levier d’unification des travailleurs, le ferment d’une renaissance de la conscience de classe.
C’est cette renaissance de la conscience de classe qui fera franchir aux luttes de demain un palier supplémentaire, vers l’idée d’une transformation bien plus profonde de la société, vers l’idée révolutionnaire.