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Leur société
Mayotte : la catastrophe continue
Lundi 21 avril, Macron a donné en spectacle son profond mépris pour les classes populaires. Après quelques heures de passage à Mayotte dévastée par Chido, il a présidé de loin, dans l’avion en direction de La Réunion, un Conseil des ministres sur la future loi « de programmation pour le développement de Mayotte ».

Alors que le nombre de victimes reste inconnu, le conseiller Outre- mer du président a prévenu : « Le bilan humain du cyclone n’est pas un sujet politique. » En revanche, il raconte une histoire pour enfant sur la reconstruction : « Mayotte doit être plus belle qu’avant le passage de Chido. » Macron promet 3 milliards d’euros d’investissements en six ans, sachant que Chido a causé plus de 3,5 milliards de dégâts sur une île où le sous-investissement était chronique bien avant le cyclone. Autant dire que les 3 milliards promis, s’ils arrivent un jour, ne seront pas à la hauteur.
Le maire (LR) de Mamoudzou a souligné que « beaucoup d’annonces ont été faites, mais… quatre mois plus tard, aucune collectivité de Mayotte n’a touché aucun euro ne serait-ce que pour le riz. » Les dégâts laissés par le cyclone crèvent les yeux : environ un tiers de la population, soit plus de 100 000 habitants, vit dans des logements précaires, les toitures sont arrachées et les routes effondrées, les bâches font toujours office de toit ou de fenêtre. Les centaines d’embarcations coulées ne sont pas évacuées et polluent les abords de l’archipel. Et il y a ce qui ne se voit pas : les assureurs qui rechignent à indemniser et les banques qui ne lâchent pas le fameux prêt à taux zéro annoncé à coups de trompe.
Les travailleurs du BTP, de la Santé, de l’Éducation, de la DAAF (alimentation, agriculture, forêt) manifestent pour les salaires et les droits sociaux qui leur sont déniés. Mayotte compte 37 % de chômeurs, le niveau de vie y est sept fois plus faible qu’en Métropole. Il est prévu que ce département le plus pauvre de France devienne une zone franche globale, avec des abattements fiscaux à 100 % pour les entreprises. Quant à la « convergence sociale » dont il est question dans le projet de loi en discussion, elle n’envisage l’alignement du smic net sur la Métropole que pour 2031 et celui du smic brut, inférieur de 440 euros, pour 2036.
Au Centre hospitalier, où il manque du personnel et où l’eau tombe à l’intérieur, le ménage a été fait rapidement pour la visite de Macron mais le personnel n’a pas voulu montrer les toilettes qui sont « dans un état catastrophique ». Devant le personnel médusé, le président s’est exclamé : « Merci infiniment pour votre mobilisation et votre courage. Vous innovez en matière organisationnelle, bravo ! » Quant à l’épidémie de chikungunya qui s’annonce, Sa Grandeur a laissé tomber : « Les vaccinations commenceront dès demain », pour les adultes majeurs avec des comorbidités.
Aux élus réunis au Conseil départemental, Macron a annoncé que, contrairement à ce qu’il leur avait promis, le nouvel aéroport ne sera pas un allongement de celui existant sur Petite-Terre mais un nouveau qui sera mis en chantier sur Grande-Terre. Il ne donne pas non plus une réponse favorable à la demande d’abrogation du titre de séjour territorialisé qui bloque sur Mayotte ceux qui en sont titulaires. Par contre, la loi en préparation prévoit la transformation du statut de Mayotte en département-région pour donner plus de leviers aux élus locaux pour gérer les fonds européens. C’est une petite manne et quelques postes supplémentaires pour s’assurer que les notables locaux serviront bien les intérêts de l’impérialisme français.
Car Mayotte est située dans le canal du Mozambique, cette route maritime particulièrement convoitée pour permettre d’éviter la mer Rouge et pour ses richesses en hydrocarbures sur lesquelles TotalEnergies est déjà bien positionné. C’est ce qui dicte à Macron sa « vision géostratégique » visant à faire de l’île un « hub logistique régional » avec le développement du port de Longoni et une deuxième base militaire. Ce n’est pas cela qui donnera un toit, une école et un espoir à ceux qui ont tout perdu.