Michelin : le grand saigneur se prétend grand seigneur02/07/20252025Journal/medias/journalarticle/images/2025/07/P12-1_Michelin_rasst_4_mars_2025_C_LO.jpg.420x236_q85_box-71%2C0%2C729%2C370_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Michelin : le grand saigneur se prétend grand seigneur

Alors que les ouvriers des usines de Cholet et Vannes sont dans l’attente de leur lettre de licenciement, la direction de Michelin communique sur la façon dont elle prétend « revitaliser » l’économie de ces deux villes, où respectivement 955 et 300 emplois auront disparu avant fin 2025.

Illustration - le grand saigneur se prétend grand seigneur

À La Roche-sur-Yon, lors de la fermeture de l’usine en 2020, Michelin avait tenu le même discours. Certes, le patron avait rayé d’un trait de plume 613 emplois, mais 635 auraient été créés ensuite « grâce » aux 3,7 millions injectés par Michelin dans l’économie locale. Mais il y a plus d’un hic dans ce conte de fées...

Les millions que le groupe se vante d’offrir ne viennent pas des poches de généreux actionnaires. Ils ne représentent qu’une infime partie des dizaines de millions touchés au fil des ans par Michelin en aides publiques, que ce soit sous la forme d’exonérations de cotisations sociales ou de subventions directes de l’État et des collectivités territoriales.

De plus, si créations d’emplois il y a eu à La Roche-sur-Yon, elles ont peu concerné les licenciés, et les emplois en question n’ont été ni forcément en CDI, ni forcément au même salaire. Quant aux 20 hectares du site de l’ancienne usine, ils ont été rachetés par l’agglomération pour 9 millions d’euros, en vue d’en faire un « pôle d’innovation industrielle »... mais pour l’heure, il reste en friche. Il n’y a rien de très innovant dans ce processus où l’argent public est versé sans compter pour faire mine de réparer les dégâts causés par un profiteur privé.

À Cholet comme à Vannes, c’est avec les mêmes ficelles, et la même complicité de l’État, que Michelin essaye de masquer son œuvre de destruction sociale. Dans les deux villes, de prétendues « conventions de revitalisation » stipulent que la collaboration entre Michelin et les pouvoirs publics va faire sortir de terre plus d’emplois qu’il n’en a liquidés. Mais dès qu’on lit entre les lignes, on comprend que le grand gagnant de l’opération sera le patronat, grand et petit.

Ainsi, toute entreprise qui embauchera un ex-salarié Michelin se verra octroyer par Michelin une subvention de 5 000 à 10 000 euros par emploi créé, et des prêts à taux bonifié de 10 000 euros. Et comme les travailleurs de Cholet et Vannes l’ont vu de leurs yeux ces derniers mois, leur « retour vers l’emploi » est vu comme un marché juteux par bien des rapaces, depuis les agences d’intérim jusqu’aux innombrables officines de formation ou de reconversion professionnelle.

Les préfets et les journalistes les plus complaisants ont beau chanter les louanges du licencieur Michelin, la réalité des fermetures d’usines signifie à chaque fois des vies plus dures, et parfois la plongée dans la misère, pour les travailleurs mis au rebut et leurs familles. Dans sa recherche du profit à tout prix, Michelin vient de céder ses deux usines sri-lankaises au groupe indien CEAT, sans aucune garantie sur l’emploi pour ses ex-salariés. Au Canada, il vient de se débarrasser de la marque Camso. Et il va fermer l’usine de Querétaro, au Mexique avant la fin de l’année : 500 travailleurs à la porte.

Alors, il y en a assez de la poudre aux yeux et des discours autosatisfaits ! À Michelin comme ailleurs, il faut prendre sur les profits pour maintenir emplois et salaires.

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