Michelin–Cholet : “tête haute, poing levé, pas de regret ! ”20/08/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/08/une_2977-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Michelin–Cholet : “tête haute, poing levé, pas de regret ! ”

Alors que, dès début juillet, toute production avait cessé à l’usine Michelin de Cholet, dans le Maine-et-Loire, la direction a attendu le 18 juillet pour envoyer les lettres de licenciements, ne laissant alors qu’une semaine aux licenciés pour accepter leur congé de reclassement.

Sur les 955 salariés du site, seuls 300 ont un point d’atterrissage : pré-retraite, mutation vers un autre site Michelin ou CDI dans une autre entreprise. Aucune de ces « solutions » n’en est vraiment une : en pré-retraite, on perd un quart du salaire ; dans une autre usine Michelin, on n’est pas sûr qu’elle ne sera pas la suivante à fermer ; et les CDI retrouvés sont souvent moins bien payés.

Comble de l’absurde, certains travailleurs sont même censés revenir à l’usine en septembre : une quarantaine, proches de la préretraite, qui se demandent bien à quoi le patron va les occuper, et les 80 de l’atelier Z, qui ne sont pas enchantés à l’idée de passer leurs dernières semaines à nettoyer ce coin du site où ils produisaient de la gomme – un lieu spécialement sale.

Et puis, il reste des centaines de travailleurs sur le carreau, à qui le « plan d’accompagnement » signé entre Michelin et tous les syndicats (sauf la CGT) ne garantit aucun avenir. Le patron brasse de l’air avec ses « modules de formation » et ses « cellules de risques psycho- sociaux ». Mais la réalité, c’est le choix délibéré des actionnaires de bouleverser la vie d’un millier de salariés – en comptant les sous- traitants – pour accroître leurs profits.

Samedi 5 juillet, à l’initiative du comité de lutte, 80 personnes – ouvriers, conjoints, enfants et amis – s’étaient retrouvées sur le parking de l’usine pour un « barbecue de l’amitié ». Après des mois à se serrer les coudes pour tenter de faire plier le patron et de lui arracher des conditions de départ les moins indignes possibles, il n’était pas question que chacun reste dans son coin à broyer du noir. C’était aussi une manière de faire un pied de nez à la direction, qui se vantait dans la presse d’être aux petits soins pour les futurs licenciés et poussait le vice (et le ridicule !) jusqu’à les inviter à venir admirer le « dernier pneu » sorti de l’usine...

Entre le 21 et le 23 juillet, qu’ils aient répondu à leur lettre de licenciement par email, par courrier ou en remettant leur document en main propre, bien des travailleurs ont eu du mal à avaler l’obligation pour eux d’apposer leur signature sur un document détaillant leur congé de reclassement. Celui-ci est en effet loin des 120 000 euros de prime supra-légale adoptés comme objectif en assemblée générale ; et chacun appréhende les coups bas même après les adieux à l’usine, notamment le flicage des démarches de recherche d’emploi.

Cependant, ainsi que résumé dans une affiche fabriquée fin juin par l’un des animateurs du comité de lutte : « tête haute, poing levé, pas de regret ! ». Le pire aurait été de se laisser mettre à la porte en silence. Or à travers leur comité, les travailleurs ont montré qu’il était possible de s’organiser pour tenir tête au milliardaire Michelin. Ils n’ont pas gagné le bras de fer, mais la fierté d’avoir relevé la tête, et ça, cela compte.

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