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Dans le monde
Salon de Shanghai : guerre entre patrons de l’automobile
Du 23 avril au 2 mai le Salon de l’automobile de Shanghai est l’occasion pour la presse occidentale de constater la suprématie des constructeurs chinois sur le segment de l’électrique en Chine et de s’inquiéter de l’avenir de l’industrie européenne.

L’édition 2025 de ce salon a réuni près de 1 000 entreprises qui ont présenté plus de 100 nouveaux modèles, dotés d’intelligence artificielle, de systèmes avancés d’aide à la conduite et d’innovations multiples en matière de propulsion électrique. À côté des géants mondiaux, européens et américains, Volkswagen, Tesla, Stellantis, exposaient les nouveaux géants chinois, dont le plus connu, BYD, et des dizaines de plus petits constructeurs espérant percer sur un marché en pleine évolution.
Avec 30 millions de véhicules vendus en 2024, la Chine est depuis quelques années le plus grand marché automobile du monde, plus important que les marchés européens et américains réunis. Et si le marché chinois a été longtemps dominé par les constructeurs européens et américains, ce n’est plus le cas. Les constructeurs chinois s’y sont imposés ces dernières années notamment dans la vente de véhicules électriques, en produisant des véhicules aussi bons et bien moins chers que ceux de leurs concurrents occidentaux.
La percée des constructeurs chinois ne tient pas du miracle ou des prétendues vertus du capitalisme. Qu’ils soient privés ou contrôlés, totalement ou partiellement, par l’État, ils ont disposé d’un atout indéniable vis- à-vis de leurs concurrents : construire une industrie nouvelle sans le passif d’une ancienne. Ils ont aussi et surtout bénéficié pendant plus de vingt ans de l’intervention de l’État. L’industrie automobile chinoise existe depuis les années 1980, quand l’État a ouvert, de façon progressive et contrôlée, son marché aux capitaux occidentaux. Les capitalistes occidentaux y ont fait des fortunes pendant quarante ans, en exploitant les travailleurs chinois. Mais, dans le secteur de l’automobile électrique, l’État n’a pas laissé faire le marché, son intervention a été décisive. Dès 2001, il a lancé des programmes de développement et considéré l’industrie des véhicules électriques comme l’une des sept industries stratégiques émergentes.
Les gouvernements locaux ont aussi travaillé en étroite collaboration avec les entreprises privées pour le plus grand bonheur de leurs actionnaires et de leurs dirigeants. Par exemple, l’entreprise privée BYD, qui a vendu plus de 4 millions de véhicules l’an dernier et dans laquelle a investi le milliardaire américain Warren Buffet, s’est développée en entretenant des relations étroites avec la ville de Shenzhen, première ville au monde à électrifier complètement son parc de bus. Conséquence de cette intervention étatique, malgré tous les discours des gouvernements occidentaux sur l’urgence climatique, c’est uniquement en Chine que les ventes de véhicules électriques et hybrides ont dépassé celles des voitures à moteur thermique.
Face à la montée en puissance des industriels chinois, les entreprises occidentales n’entendent cependant pas lâcher ce marché. Au salon de Shanghai, Renault, Stellantis, Volkswagen ont contre- attaqué, en baissant leurs prix et en essayant de se mettre au même niveau technique que leurs concurrents chinois, ce qui ne peut se faire qu’en intensifiant l’exploitation de leurs propres salariés. Les constructeurs chinois ripostent en cherchant eux aussi à exporter leurs voitures en Europe et aux Amériques. Les entreprises de toute la planète sont engagées dans une guerre commerciale acharnée. Elles peuvent compter sur leurs États nationaux pour les aider à pénétrer les marchés extérieurs tout en fermant au maximum leur marché intérieur.
Les travailleurs, qu’ils soient chinois, européens ou américains, ne peuvent qu’être victimes de cette guerre, licenciés ou contraints de subir des salaires à la baisse et des cadences infernales pour que les industriels de toutes nationalités puissent augmenter leurs marges. Les États ne protègent pas les travailleurs mais seulement les profits de leurs capitalistes.