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Leur société
Sarkozy : de bling-bling en zonzon
Le 25 septembre, Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans de prison dans le procès du supposé financement libyen de sa campagne électorale de 2007.
Au titre de l’exécution provisoire, son placement en détention est inévitable, même s’il a fait appel. Faveur tout de même, Sarkozy connaîtra la date de son incarcération le 13 octobre, « pour organiser sa vie professionnelle ».
Pensez donc ! Sarkozy a un agenda rempli : il donnait une pleine page d’interview au Figaro il y a un mois, rencontrait Lecornu à peine nommé Premier ministre. L’ex-président de la République, ressorti libre du tribunal, a pu dénoncer dans la presse complaisante « l’injustice » qu’il subit et « la haine des magistrats ».
La corruption, le recel de détournements de fonds, le financement illégal de campagne ont été rejetés dans le verdict faute de preuves indiscutables. La formulation de relaxe d’Éric Woerth, le trésorier de campagne de Sarkozy, est éclairante sur les motivations des juges : « Le tribunal, bien que n’accordant aucun crédit aux explications avancées par Éric Woerth, constate qu’il ne ressort pas, de manière indubitable […], que ces sommes seraient issus de fonds libyens ». En clair, la défense des accusés n’est pas crédible, mais la justice n’a pas pu prouver que des millions d’euros ont été versés en échange de faveurs faites à Kadhafi.
Des disparitions ont, il est vrai, été opportunes : le ministre libyen du pétrole, Choukri Ghanem, dont un carnet signalait le versement de 6,5 millions d’euros pour la campagne de Sarkozy, a été retrouvé noyé à Vienne en 2012 et Kadhafi a été exécuté en 2011 dans le sillage d’une opération militaire orchestrée par Sarkozy ; l’homme d’affaires Ziad Takkiedine, mort le 23 septembre, se cachait au Liban depuis des années après avoir avoué à la presse le transport de valises bourrées d’argent.
La justice a, en revanche, considéré comme prouvées les rencontres en Libye d’Abdallah Senoussi et de Claude Guéant, alors chef de cabinet du ministre de l’Intérieur Sarkozy, puis de Brice Hortefeux, au titre d’ami de Sarkozy. Senoussi, actuellement emprisonné en Libye, beau-frère et ex-chef de la Sécurité intérieure de Kadhafi, avait été condamné par contumace en France en 1999 pour l’attentat contre le DC10 d’UTA et ses 170 morts dix ans auparavant. Guéant et Hortefeux jouaient les intermédiaires auprès de ce triste sire et ils ne préparaient certainement pas des circuits touristiques. C’est pour ces rencontres que Sarkozy est reconnu coupable d’association de malfaiteurs avec ceux qui seront ses ministres de l’Intérieur successifs. Brice Hortefeux écope de deux ans de prison et Claude Guéant de six ans. Tous deux, bien sûr, étaient au poste de premier flic de France adeptes d’une police et d’une justice intraitable avec les pauvres, comme leur parrain qui prétendaient nettoyer « la racaille » au Kärcher.
Sarkozy sera le premier ex-président de la République à dormir en prison, après y avoir échappé dans l’affaire Bismuth grâce à un bracelet électronique. Il devient un champion des verdicts prononcés contre des politiciens entremêlant leurs petites affaires avec les grandes affaires de la bourgeoisie.
L’exploit – alors que ses prédécesseurs traînaient aussi leur lot de casseroles – peut réjouir puisqu’il se termine à la case prison. Mais même dans une cellule VIP de la Santé, d’où les juges pourraient le faire sortir assez vite, et même si son palmarès judiciaire s’enrichissait du fait des soupçons de corruption dans l’attribution du Mondial au Qatar, Sarkozy ne sera pas sur la paille, ni au propre ni au figuré.