Ukraine : Zelensky à la peine13/08/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/08/une_2976-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Ukraine : Zelensky à la peine

La nuit du 1er août à Vinnitsia, une ville du centre- ouest de l’Ukraine, une foule a tenté d’envahir le stade Locomotiv. Le matin, l’armée y avait parqué des centaines de conscrits que leurs parents et des amis voulaient libérer.

Gaz lacrymogènes, escouades de maîtres-chiens, la police restée maître du terrain a procédé à plusieurs arrestations. Mais, à en croire les médias ukrainiens, c’est au nord-est, dans la seconde ville du pays, Kharkiv, qu’il se produit le plus de faits de rébellion contre les CTR (centres de recrutement) et leurs sbires. Ainsi, parmi une demi-douzaine de cas recensés en juin, un jeune de 29 ans a mis le feu à un CTR. Arrêté depuis, il risque dix ans de prison.

Hormis quelques cas de rébellion plus ou moins organisés, comme à Kamianets-Podilskyi récemment, il s’agit souvent d’actes individuels. Cela même si, spontanément, des passants viennent souvent à la rescousse de ceux qui refusent de se voir embarquer dans une guerre d’autant plus sanglante qu’elle apparaît maintenant comme se prolongeant sans réel enjeu. Ou plutôt, sans que les enjeux invoqués par le pouvoir puissent obtenir une large adhésion.

Car le régime de Zelensky, présenté comme populaire et encensé comme un modèle de démocratie par les médias et gouvernements occidentaux, a récemment vu sa cote chuter fortement. Le 22 juillet, le Parlement ukrainien, la Rada, à une écrasante majorité, a voté une loi qui soumettait au parquet, donc au pouvoir, les organes anti-corruption du pays. Et cette loi, le président Zelensky s’est empressé de la promulguer.

Des foules de manifestants sont descendues aussitôt dans la rue, surtout dans le centre de Kiev, aux cris de « trahison ». Ces manifestants, souvent jeunes et proches politiquement de Zelensky, même s’ils ont été rejoints par d’autres et y compris par des soldats, avaient de quoi se sentir « trahis ». Pour beaucoup, passe encore que Zelensky ait depuis longtemps mis en pièces le code du travail, qu’il fasse rafler dans la rue la chair à canon qui n’a pas eu les moyens financiers et sociaux d’échapper au front, qu’il soit entouré de ministres, généraux, oligarques qui, tôt ou tard, se font limoger, voire arrêter, pour abus de pouvoir et pots-de- vin à grande échelle. Quitte à ne pas être trop regardant, Zelensky pouvait encore apparaître, pour certains, comme l’honnête « serviteur du peuple », ennemi de la corruption et des corrompus, de la série télévisée ayant fait sa célébrité. Mais, cette fois, alors que l’ex- ministre de l’Unité territoriale devait être inculpé et que l’ex- ministre de la Santé faisait l’objet d’une enquête pour corruption, sa signature immédiate s’étalait comme une provocation. Cette loi était une assurance accordée aux hauts bureaucrates et aux oligarques qui s’enrichissent comme jamais avec la guerre.

Il est vrai que les deux organes anti-corruption, créés en 2014 et 2015, avaient la réputation d’être peu efficaces, de ne pas chercher à lutter contre un phénomène qui vaut à l’Ukraine de figurer à la 105e place mondiale en ce domaine ! Mais Zelensky, qu’il se soit senti tout permis ou qu’il ait voulu faire un cadeau à ceux qu’il sert à la tête de l’État, a cru qu’il pouvait impunément tomber le masque ou plutôt faire tomber deux feuilles de vigne.

L’affaire arrivait au plus mauvais moment : Trump l’ayant lâché, les derniers soutiens de Zelensky, les membres de l’Union européenne, ont besoin, vu précisément leur politique vis-à-vis de la guerre en Ukraine, d’avoir un président ukrainien qui présente « bien ». En tout cas, mieux vaudrait qu’il n’ait pas l’air de ce qu’il est réellement : celui que les nantis locaux, pourris et corrompus jusqu’à la moelle, se sont choisi pour les servir.

Les représentants de la bourgeoisie européenne, qui n’ignorent rien de la réalité, n’ont pas apprécié qu’elle s’affiche avec tant d’impudence. Ils ont aussitôt fait assaut d’indignation, parlant de « sérieux recul » dans la voie de l’adhésion de l’Ukraine à l’UE. Zelensky a donc fait marche arrière, biffé sa signature sous la loi faisant problème. Si cela change tout sur le papier, en fait, cela ne doit pas tromper grand-monde dans la population. Ceci expliquant cela, cela donne quelque poids à la rumeur qui veut que, cet été, des soutiens étrangers de l’Ukraine et des dirigeants de ce pays se soient retrouvés discrètement dans les Alpes pour discuter de l’après-Zelensky…

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