- Accueil
- Lutte ouvrière n°2979
- Chine : face à Trump, le grand spectacle de Xi Jinping
Dans le monde
Chine
face à Trump, le grand spectacle de Xi Jinping
Du 31 août au 3 septembre, Xi Jinping a reçu à Tianjin, en Chine, une vingtaine de chefs d’État parmi lesquels les dirigeants russe, indien, turc, iranien, ainsi que le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, dans le cadre de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS).

L’OCS est une structure mise sur pied par la Russie et la Chine à la fin des années 1990, après l’effondrement de l’URSS, pour tenter de régner ensemble sur l’Asie centrale. Dans les années 2000, leurs dirigeants ont voulu faire de cette structure un pôle régional offrant une alternative à la domination de l’impérialisme occidental. En fait, il existe de nombreuses structures semblables auxquelles participent les pays d’Asie, en fonction des intérêts de leur bourgeoisie. Ainsi l’Inde et le Pakistan ont rejoint l’OCS en 2005 mais l’Inde participe aussi au QUAD, une alliance militaire avec les États-Unis, l’Australie et le Japon qui vise, avec d’autres, à endiguer la puissance montante chinoise.
Le sommet de l’OCS a été présenté comme celui d’une alliance anti-occidentale ou anti-OTAN, qui représenterait près de la moitié de la population mondiale et un quart du PIB de la planète. En réalité, l’OCS n’est rien d’autre qu’un espace de rencontre entre dirigeants de pays asiatiques, sans que des engagements en résultent. Contrairement à l’OTAN, à la main des États-Unis, il n’existe entre les pays de l’OCS aucun commandement intégré, aucune mutualisation de forces.
Cette réunion de l’OCS a donc surtout été l’occasion pour les dirigeants chinois, russe et indien de s’afficher. Xi Jinping a ainsi voulu apparaître aux yeux de sa population comme étant au centre du monde. S’adressant aux dirigeants et capitalistes asiatiques, il a dénoncé « la mentalité de guerre froide » des puissances occidentales et parlé « d’élargir le champ de la coopération […] et endosser ensemble la responsabilité de la promotion de la paix, de la stabilité et de la prospérité dans la région ». Le défilé militaire du 3 septembre, à l’occasion du quatre-vingtième anniversaire de la libération de la Chine de l’occupation japonaise, devait faire vibrer la corde nationaliste en démontrant aux Chinois la puissance du pays.
Pour Poutine, qui a dénoncé les responsabilités de « l’Occident » dans la guerre en Ukraine mais bien sûr pas les siennes, l’OCS a été une occasion de montrer qu’il n’est pas isolé. Il a pu se mettre en scène, les traducteurs ayant relayé à la presse ses mots à destination de Xi Jinping et Narendra Modi : « Nous trois, tous amis ! »
Alors que l’Inde et la Chine sont en guerre larvée sur la frontière himalayenne, la présence de Modi à Pékin, une première depuis 2018, est une réponse à Trump et à sa décision de taxer les produits indiens à hauteur de 50 %, pour lui dire que les entreprises indiennes peuvent trouver d’autres débouchés en Asie.
Dans les conflits à venir, les alliances effectives n’auront sans doute que peu de rapport avec l’affichage de Tianjin. Mais alors que les puissances impérialistes occidentales renforcent le protectionnisme et durcissent les relations internationales, bien des travailleurs et des pauvres, révoltés à juste titre par les guerres et le pillage qu’elles entretiennent pourraient voir dans cette réunion l’amorce d’une alternative à leur domination. C’est d’ailleurs ce que cherche le régime chinois, en particulier, en en appelant à l’ONU et à l’OMC, dont les États-Unis veulent dorénavant se passer. De sa part, c’est de bonne guerre. Mais, pour les travailleurs, le problème n’est pas de changer de maîtres et d’exploiteurs, il est de s’en libérer, sans se laisser abuser par le spectacle qu’ils donnent.