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Article du journal
Gaza
le crime de masse continue
Les informations qui parviennent de Gaza, plus révoltantes les unes que les autres, montrent comment l’armée israélienne mène une guerre ouverte contre la population civile sans cesse déplacée, bombardée et affamée pour la pousser au désespoir et la préparer à l’exil volontaire.
Les médias ont changé de ton, en même temps que les dirigeants américains et européens élevaient de timides et hypocrites protestations contre cette extermination en cours.
Ainsi France 2 a montré les terribles images des corps des neuf enfants de la famille Al Najjar, âgés de 7 mois à 12 ans, tués le 23 mai à Khan Younès, après un raid de l’aviation israélienne. Les Al Najjar étaient un couple de médecins, sans lien avec le Hamas. Mais les hôpitaux et le personnel médical, qui permettent la survie des Gazaouis, sont systématiquement visés. Sur les 36 hôpitaux de l’enclave, la moitié a été entièrement rasée tandis que les autres fonctionnent de façon dégradée, avec des installations endommagées et presque sans médicaments.
Invité dans les médias, l’historien Jean-Pierre Filiu, qui a passé un mois à Gaza en janvier avec Médecins sans frontières et publie un livre de témoignage, a dressé un tableau aussi glaçant qu’éloquent. Outre les zones entières rasées « avec des cratères béants et des amoncellements de décombres », il décrit la lutte quotidienne des habitants pour rafistoler leurs abris de fortune soumis aux intempéries, trouver à manger et à boire, faire leur toilette et leurs besoins, le tout sous la pression permanente de l’armée israélienne. Ainsi chacun doit survivre avec 9 litres d’eau par jour dont seulement 2 litres d’une eau à peine potable.
Filiu rapporte comment l’armée israélienne, non seulement organise la famine en bloquant les convois de ravitaillement, mais favorise l’action des pilleurs contre les rares convois qui passent. Elle impose leurs parcours puis vise les escortes de sécurité mises en place par l’ONU, livrant les camions aux gangs, dont elle assure la protection sinon l’armement. Cette politique vise à semer le chaos en terrorisant la population et en affaiblissant ce qui reste d’organisation, qu’elle émane des structures familiales de Gaza, des fonctionnaires gazaouis encore en poste ou des troupes du Hamas.
Netanyahou et les chefs de l’armée israélienne font tout pour rendre définitivement impossible l’existence des Palestiniens à Gaza et pour saper la restauration d’une autorité palestinienne, quels qu’en soient les dirigeants. Par bien des aspects, le fantasme trumpien de transformer Gaza en une riviera du Moyen-Orient sert leur projet. Si Trump, tout à ses affaires avec les dirigeants arabes de la région, et d’abord les riches pétromonarchies du Golfe, bat froid à Netanyahou et prend quelque distance avec l’opération militaire en cours, il n’a pas retiré son soutien militaire à Israël.
Pour l’heure, dans la tragédie en cours, un espoir est porté par la petite fraction de la population israélienne qui se mobilise contre les crimes de guerre menés en son nom. Outre les manifestations régulières à Tel Aviv contre Netanyahou, son mépris de la vie des otages et le caractère de plus en plus autoritaire de son gouvernement, des Israéliens dénoncent le sort fait aux Palestiniens. Ainsi quelque 400 personnes se sont rassemblées à Sderot, à quelques kilomètres de Gaza pour scander « Ce n’est pas en affamant et en tuant des enfants, des femmes et des vieillards qu’on aura la sécurité ! » en brandissant des pancartes « Halte au génocide à Gaza ». Ceux qui, dans la population israélienne, comprennent qu’ils ne pourront vivre en sécurité en exterminant leurs voisins, peuvent jouer un rôle décisif pour changer la donne.