Iran : les camionneurs en lutte04/06/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/06/une_2966-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Iran

les camionneurs en lutte

Depuis le 19 mai, des dizaines de milliers de camionneurs iraniens sont en grève contre l’augmentation du prix des carburants et des assurances. La grève touche près de 140 villes, paralyse les transports et commence à s’étendre à d’autres catégories.

En Iran, quelque 400 000 camions assurent l’essentiel du transport des marchandises. La majorité des chauffeurs possèdent un unique véhicule, tandis que les plus précaires le louent au prix fort ou font équipe avec un indépendant.

Alors que l’Iran est producteur de pétrole, les chauffeurs payent le carburant toujours plus cher. Des primes d’assurance passées de 15 à 45 dollars par mois en peu de temps s’ajoutent à des taxes et des amendes diverses. Ils doivent entretenir des camions vétustes, gourmands en carburant, en achetant des pièces détachées hors de prix quand elles sont disponibles. L’embargo américain s’ajoute aux monopoles sur les importations détenus par les dignitaires du régime pour faire grimper le prix des pièces, en particulier celui des pneumatiques. Malgré des centaines d’heures de travail, les chauffeurs ne gagnent guère plus de 200 dollars par mois.

La grève a démarré à Bandar Abbas, une ville côtière près du détroit d’Ormuz, après qu’une explosion sur le port voisin a détruit des camions et tué plusieurs chauffeurs. Sans surprise, les camionneurs se sont heurtés au mépris des autorités, complices des compagnies d’assurances pour ne pas verser les indemnisations dues. Trois jours plus tard, la grève touchait une dizaine de villes. Pour tenter de l’enrayer, le gouvernement a proposé aux grévistes, par SMS, d’augmenter le volume de carburant détaxé alloué aux camionneurs. « Nous ne voulons pas de charité, nous voulons nos droits », ont répondu ceux-ci. La grève s’est alors étendue, y compris aux chauffeurs de taxi ou de petits pick-up.

Pour entraver le mouvement, le gouvernement alterne promesses, propagande et répression. La commission parlementaire des transports a annulé un projet de nouveau tarif du diesel. Les médias du régime minimisent l’ampleur de la grève tout en accusant les chauffeurs des pénuries de fruits et légumes visibles à Téhéran et du non-enlèvement des récoltes des agriculteurs. Enfin la police distribue les amendes sur les lieux de manifestation et arrête des grévistes. Dans un pays où la vie chère, le coût des assurances, les pénuries touchent toute la population, la lutte des camionneurs pourrait être contagieuse.

De leur côté, les boulangers sont mobilisés depuis le 17 mai, contre la hausse des prix de l’énergie et des assurances, contre les dysfonctionnements du logiciel qui gère la distribution subventionnée du pain et de la farine et contre les coupures intempestives d’électricité qui gâchent régulièrement leur production.

La colère de ces travailleurs, pour la plupart indépendants, s’ajoute à celle de salariés régulièrement en grève pour toucher leurs salaires. Dans un pays dirigé par un régime répressif, de plus en plus haï et contesté, celui-ci ne peut que craindre de voir ces revendications économiques déboucher sur des revendications politiques.

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