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Leur société
Logement : sans toit ni loi
Le 4 septembre, la Fondation pour le logement a publié son cinquième baromètre de l’encadrement des loyers. Censée limiter la hausse continue des loyers, cette mesure est loin de permettre aux familles modestes de se loger.
La loi Alur, passée en 2014 sous le gouvernement Hollande, était censée être une grande mesure sociale. Elle prévoyait l’encadrement des loyers dans les zones « à forte tension », comme les grandes métropoles, où le manque de logements permet aux bailleurs d’imposer leurs prix. En réalité, il ne s’agissait pas de bloquer les loyers, encore moins de les baisser, et le loyer de référence était fixé par les agences immobilières. Autant dire que la mesure était limitée, mais elle était encore de trop pour les bailleurs privés et en 2018, la loi Elan en faisait une expérimentation limitée aux collectivités volontaires.
Aujourd’hui, l’encadrement des loyers est donc expérimenté dans 69 villes mais le baromètre de la Fondation pour le logement constate qu’il n’est pas respecté. Dans l’ensemble, le pourcentage d’annonces dépassant les plafonds de loyer n’a cessé d’augmenter pour atteindre 32 % en 2025. C’est en banlieue parisienne que les bailleurs les multiplient : dans les communes regroupées au sein de Plaine Commune, en Seine-Saint-Denis, 59 % des annonces crèvent les plafonds. Et partout l’addition est salée pour les locataires. En moyenne, les dépassements représentent 237 euros mensuels à Paris, 161 euros à Villeurbanne, 122 euros à Lille, ou encore 154 euros à Bordeaux.
Parmi ces logements aux loyers surgonflés, les petites surfaces et les passoires thermiques sont surreprésentées. Les smicards, les mères célibataires, les étudiants ou les petits retraités en sont donc les premières victimes.
Certains bailleurs dépassent les plafonds en toute illégalité, comme les propriétaires de passoires thermiques classées en G, dont 38 % des annonces demandent des compléments de loyer, ce qui est interdit pour les logements classés F et G. Mais la plupart des propriétaires et des agences n’ont même pas besoin de tricher pour dépasser le loyer plafond, car la loi les autorise à appliquer un complément en fonction de caractéristiques exceptionnelles comme « une vue remarquable ou un équipement rare ». Ces critères sont suffisamment vagues pour que des propriétaires n’hésitent pas à inscrire la présence d’un simple balcon ou d’une plaque de cuisson pour justifier un complément pouvant atteindre 20 euros par mètre carré ! D’après la Confédération nationale pour le Logement (CNL), les professionnels de l’immobilier et les bailleurs-entreprises ne sont pas en reste pour détourner le texte ou trouver le moyen de s’en libérer, par exemple en faisant signer à des locataires étudiants domiciliés administrativement chez leurs parents un bail en résidence secondaire, ce qui permet de s’affranchir de l’encadrement des loyers.
Le logement est le premier poste de dépense des familles et le nombre d’expulsions locatives a explosé, avec 25 000 ménages mis à la rue en 2024. D’après l’Union sociale de l’habitat, il faudrait, pour répondre aux besoins, construire 500 000 nouveaux logements par an d’ici 2040. L’État n’étant pas près d’imposer aux promoteurs et aux géants du bâtiment de construire massivement les logements bon marché qui manquent, on en reste à cet état de pénurie qui donne les moyens aux bailleurs grands et petits de dépouiller les locataires.