- Accueil
- Lutte ouvrière n°2974
- Loi Duplomb : au profit de l’agro-industrie
Leur société
Loi Duplomb : au profit de l’agro-industrie
Mardi 29 juillet, plus de 2 millions de personnes avaient signé la pétition contre la loi Duplomb. Un des aspects les plus contestés de la loi est la réintroduction de l’acétamipride, un néonicotinoïde nocif pour les abeilles interdit depuis 2018.
Les néonicotinoïdes sont une catégorie d’insecticides dérivés de la nicotine, développés par les industriels de l’agrochimie dans les années 1980. Ils ont connu un très fort développement depuis les années 1990 du fait de leur grande efficacité, prenant ainsi la place de divers autres insecticides interdits à cause de leur nocivité, dont ceux dérivés du DDT.
Actuellement, 40 % des insecticides vendus dans le monde sont des néonicotinoïdes, utilisés massivement dans l’agriculture, mais aussi pour divers usages domestiques. Leur interdiction dans l’Union européenne est donc un enjeu de taille, d’abord pour les industriels de l’agrochimie, qui en retirent des profits énormes, mais aussi pour bien des agriculteurs.
Les apiculteurs, dont les abeilles peuvent être décimées par ce pesticide, ont évidemment des raisons d’être inquiets, alors que les betteraviers, eux, pourront maintenir leurs rendements. Cette loi touche aussi les éleveurs de bovins, qui utilisent des betteraves pour nourrir leurs animaux et qui peuvent voir d’un bon œil la réintroduction du néonicotinoïde.
Des producteurs de lait cultivent des betteraves fourragères car cet aliment très riche permet d’augmenter la production laitière des vaches. Augmenter la production est une question de survie pour certains qui doivent moderniser leur élevage. Ils sont pris en tenaille, d’un côté par les banques du fait d’investissements sans cesse plus élevés, de l’autre par l’industrie laitière et la grande distribution qui maintiennent des prix bas. Certains d’entre eux se retrouvent ainsi derrière les défenseurs de la loi Duplomb et les puissants agriculteurs du secteur betteravier.
La nécessité de produire plus et plus vite pousse les agriculteurs à utiliser ce type de produits phytosanitaires car ils sont efficaces à court terme et prennent moins de temps que d’autres pratiques. Mais ils représentent surtout un marché de 5,3 milliards de dollars dans le monde pour les industriels de la chimie comme Syngenta ou Bayer. Ces industriels ont-ils déjà une molécule alternative ? Ont-ils étudié d’autres pratiques ? Ont-ils commencé des recherches ou attendent-ils que l’État les subventionne pour se pencher sur le problème ? Évidemment, la population et les agriculteurs n’en savent rien. En attendant, la réintroduction de l’acétamipride pourra assurer aux industriels une rente pour plusieurs années.
Les petits éleveurs et cultivateurs ne sont pas victimes de la réglementation comme le prétendent la FNSEA et la Coordination rurale. Si eux n’ont pas les moyens financiers pour s’adapter aux changements de réglementation, ce n’est pas le cas des cultivateurs qui exploitent plusieurs dizaines d’hectares de betterave et qui sont favorisés par la loi. Les petits agriculteurs sont ainsi les perdants d’un système qui, en plus de les pressurer, utilise leurs difficultés pour camoufler les intérêts des capitalistes du secteur.