- Accueil
- Lutte ouvrière n°2974
- Travailleurs saisonniers : l’exploitation par tous les temps
Dans les entreprises
Travailleurs saisonniers : l’exploitation par tous les temps
Comme chaque été, de nombreux secteurs, de l’agriculture à l’hôtellerie et la restauration, tournent grâce à des centaines de milliers de saisonniers. Et comme chaque année, les témoignages affluent sur les conditions que ces travailleurs doivent affronter.
Plusieurs organisations syndicales animent des permanences ou des caravanes pour rencontrer ce personnel, engagé pour trois à six mois, lors des pics d’activité liés au tourisme ou à l’agriculture. Un site internet, Staff-Advisor, créé par un maître d’hôtel lui-même saisonnier, invite les travailleurs à laisser un avis sur les conditions de vie, de travail et de salaire qu’ils ont trouvées.
Qu’il s’agisse des avis qu’on trouve sur la plateforme ou des échanges rapportés par les organisations syndicales, les problèmes qui reviennent le plus souvent concernent les salaires et le temps de travail à rallonge. Ainsi, une barmaid engagée par un restaurant en Charente raconte que, parce qu’elle avait exigé le paiement des heures supplémentaires qui lui étaient dues, son employeur l’a harcelée en décrétant qu’il n’aimait pas les gens procéduriers… Un travailleur d’un village vacances de Haute-Savoie énumère « des demandes de faire toujours plus d’heures avec chantage à la prime en cas de refus, les repas oubliés la moitié du temps, le manque de personnel et les conditions encore plus pénibles des travailleurs immigrés, forcés de rester pour leurs papiers malgré des conditions et des charges de travail déplorables ». Une travailleuse agricole, employée au mois de juin au palissage des vignes dans la Marne souligne quant à elle « les propos sexistes et misogynes incessants » auxquels elle a été confrontée.
Pour imposer leur loi, les patrons usent et abusent des conditions temporaires et précaires des saisonniers. Un ouvrier agricole du Tarn s’est ainsi vu expliquer que quelle que soit la durée réelle de la journée de travail, tout le monde était payé pour 7 h 30, mais qu’il pouvait « ramener des légumes » ! Des employeurs, notamment dans la restauration, présentent le repas dû aux salariés comme un avantage qui justifierait leur travail gratuit. Dans ce secteur, de nombreux serveurs dénoncent la pratique du partage des pourboires en fin de saison, qui peut aboutir à la disparition de centaines d’euros. De même, la promesse de régler les heures supplémentaires en fin de saison reste souvent lettre morte et il faut alors se battre pour se les faire payer.
Les conditions de logement constituent l’autre point noir. Des ouvriers agricoles se voient attribuer pour tout logement un lit de camp installé dans un coin de hangar, dépourvu de sanitaires, voire d’accès à l’eau, parfois sans électricité. Un animateur sportif engagé dans un camping raconte que le patron lui a proposé de se loger dans un mobil-home en travaux qu’il ne pouvait décemment pas proposer à ses clients puisqu’il n’avait même pas de porte.
Tout cela n’empêchera pas des patrons décomplexés de se scandaliser de ne pas réussir à recruter et de réclamer des aides. Les dirigeants politiques vanteront alors leurs mesures pour « remettre les chômeurs au travail » et chacun se félicitera de promouvoir cette prétendue « culture du travail » qui consiste en réalité à cultiver et faire croitre l’exploitation.